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Marilyn Bridges, Langdon Clay, Larry Fink, Seymour Jacobs, Clemens Kalischer, Michael Kenna, Edward Steichen, Alfred Stieglitz et Michel Vanden Eeckhoudt : autant de points de vue sur une ville mythique, présentés à Ixelles.
uatre personnages évoluant dans le Coney Island des années 1950 dans Wonder Wheel , le dernier film de Woody Allen actuellement au cinéma ; Brooklyn et Manhattan déclinés en quatre versions d’un même destin, des années 1940 aux années 1960, au fil des mille pages de 4321 , le colossal roman de Paul Auster paru en français le mois dernier : New York est partout, toujours, incontournable phare dans la nuit atlantique, dont l’histoire est intimement mêlée à celle de la modernité et donc, du cinéma et de la photographie.
C’est cet angle ô combien séducteur et efficace qu’a choisi Alain D’Hooghe pour une exposition collective qui ne manque pas de charme : la ville « la plus photogénique au monde » selon le galeriste est aussi statistiquement la plus photographiée – devant Rome, Barcelone et même Paris ! « Exubérante, irréelle, excessive, trépidante, parfois impitoyable, New York semble familière même à ceux qui n’ont jamais foulé son bitume. Ce paradoxe est le fait du cinéma, de la littérature, de la musique populaire. Et de la photographie. Quels que soient nos origines, notre âge, nos goûts, notre parcours, nous “ connaissons” New York », déclare-t-il.
Et pour rappeler cet ancrage historique, l’exposition offre une rare sélection de photogravures extraites de la revue Camera Work, publiée par Alfred Stieglitz (1864-1946) au tout début du XXe siècle : figurent l’emblématique « Flatiron Building » immortalisé dans la brume par Edward Steichen (1879-1973) en 1904 ainsi que cinq vues de « Big Apple » par Stieglitz lui-même, dont une icône de l’histoire de la photographie, The Steerage (L’entrepont), à la croisée du courant pictorialiste et d’un modernisme précoce tirant vers le cubisme.
Michael Kenna (né en 1953) et Marilyn Bridges (née en 1948) nous immergent également dans le bâti new-yorkais avec les inlassables promenades de l’un, paysagiste anglais qui livre ses points de vue inédits sur la ville, et les vues aériennes de l’autre : Bridges a réalisé toutes ses vues depuis des petits avions monomoteurs ou, plus rarement, des hélicoptères, offrant un point de vue inhabituel et vertigineux sur les gratte-ciels les plus fameux de Manhattan !
Portraits d’inconnus
New York, c’est aussi – et peut-être avant tout – sa foule bigarrée, témoignant d’une histoire de l’immigration que la littérature et le cinéma n’ont pas non plus manqué de sublimer. Déjà montré par la Box Galerie en 2015, Larry Fink (né en 1941) a démarré sa prestigieuse carrière à New York, emménageant à Greenwich Village, au sud de Manhattan, à la toute fin des années 1950. Épicentre de la contre-culture, le Village lui ouvre alors les portes du jazz, de la drogue et de la poésie alternative : Fink s’y lie d’amitié avec une bande de marginaux rassemblés autour de la figure de Turk LeClair. Attachés au langage corporel et fascinés par les codes sociaux, les clichés qu’il expose cette fois-ci nous ramènent à la fin des années 1970, dans l’ambiance du Studio 54.
Dans le sillage de Diane Arbus, Seymour Jacobs (1931-1999), natif de Coney Island, s’est quant à lui attaché à saisir sans relâche la plage de Brighton, l’une des plus populaires de Brooklyn – une démarche remarquée de ce côté de l’Atlantique, avec entre autres une exposition au Musée de la Photographie à Charleroi. La série exposée ici est inédite : réalisée dans un dancing de Coney Island, elle met en scène des personnages qu’on pourrait croire tout droit sortis d’un film de Martin Scorsese ou de John Cassavetes – des hommes et des femmes en lutte avec la vanité, le désir et la peur de vieillir : « Jacobs les observe avec une empathie et un sens du tragique qui constitue le fil rouge de toute son œuvre », déclare Alain D’Hooghe.
Citons enfin les clichés empreints de poésie du Belge Michel Vanden Eekchoudt (1947-2015) et les étonnants « portraits » nocturnes réalisés par Langdon Clay (né en 1949), qui s’est servi de l’éclairage public pour mettre en scène le chrome et l’acier des voitures arées le long de trottoirs déserts – autant de symboles de l’Amérique du XXe siècle qu’on se surprend parfois à la regretter.
« New York New York », jusqu’au 17 mars, Box Galerie, du mercredi au samedi de 12 à 18h, 102 chaussée de Vleurgat, 1050 Bruxelles, 02-537.95.55, www.boxgalerie.com