Peter eut un petit rire.
— Aucune idée, quand j’ai débarqué dans ce monde, mon protecteur m’a demandé si je voulais rester à New York ou si je voulais aller dans une autre ville. J’ai répondu que je ne me voyais pas vivre ailleurs qu’ici. Je te l’ai dit, je ne sais pas tout. Il existe des règles et j’en ai compris quelques-unes, d’autres m’échappent. Et c’est pour tous les morts pareils.
Il marqua un nouveau temps mort et continua :
— Je sais à qui tu penses. À ton père.
Lisa hocha la tête affirmativement. Elle n’osait pas poser la question tant elle redoutait la réponse : voir ou ne pas voir son père, le résultat serait le même, de la tristesse.
— Ton père ne se trouve pas à New York, dit calmement Peter.
— Cela ne m’étonne pas, lâcha Lisa d’un air soulagé. Il disait toujours que cette ville était son enfer.
— Je ne sais même pas s’il se trouve dans une autre ville ou ailleurs.
— Ailleurs ?
— Oui, quand notre période de purgatoire est finie, nous partons pour cet ailleurs, mais personne ne sait à quoi il correspond, car personne n’est jamais revenu pour le décrire.
Des milliers de questions se bousculaient dans la tête de Lisa, mais elle préféra les garder pour elle ; plus tard, le temps serait plus propice pour les poser.
— Et moi dans tout cela ? questionna-t-elle en se tournant vers l’ami de son père.
— Nous avons besoin de toi. Tu dois nous aider à retrouver l’assassin de John Lennon.
Lisa ne put s’empêcher de rire.
— Tout le monde le connaît, il s’agit de Mark Chapman et aux dernières nouvelles, il se trouve toujours à la prison d’Attica. Toutes ses demandes de liberté conditionnelle ont été refusées.
Peter hocha la tête avec un petit sourire crispé.
— Je sais, mais tu oublies que tu n’es plus dans ton monde.
Lisa posa machinalement la main sur le bras de Peter, mais elle ne rencontra aucune résistance et se retrouva à toucher sur la banquette. Le policier lui sourit.
— Tu peux sentir les objets, mais pas les fantômes. Nous, on peut toucher les objets, la preuve il conduit son taxi, mais pas les vivants. Ne me demande pas pourquoi, je n’en sais rien. On s’y habitue vite.
— OK, alors pourquoi je suis là ?
— John Lennon a disparu avant-hier, dit-il. Et cela nous inquiète beaucoup.
— Je ne comprends pas, répondit Lisa. J’avoue que je suis complètement perdue.
— Qui ne le serait pas ? Je suis désolé de te brusquer, mais j’ai vraiment besoin de toi.
Lisa poussa un long soupir. Elle n’acceptait toujours pas cette situation, mais pour l’instant elle devait se contenter d’agir comme si.
— Nous avons besoin de toi, insista Peter.
— Pour retrouver l’assassin du fantôme de John Lennon ? dit-elle d’un ton ironique.
Peter lâcha d’une voix douce que Lisa ne lui connaissait pas :
— Tu as tout compris.
— Pas tout. Par exemple comment un fantôme peut mourir ?
— Justement, il ne peut pas. Pour simplifier, le jour où nous avons accompli notre peine dans ce purgatoire, une force nous pousse vers une porte. Ici, à New York, elle se trouve au bout du Brooklyn Bridge. Nous savons alors que notre temps est fini, nous passons la porte et fin de la partie.
— Et après ?
— Après, comme je te l’ai dit personne n’est revenu.
Une petite moue apparut sur le visage de Lisa, de nouvelles questions se bousculaient dans son esprit, rejoignant les anciennes, mais elle décida de les mettre de côté et d’accepter la situation telle qu’elle se présentait. De toute façon elle n’avait pas le choix.
— Nous arrivons, lança le chauffeur de taxi en se garant devant le Madison Square Garden.